13 février 2019
Projet de loi organique portant modification du statut d'autonomie de la Polynésie française et projet de loi portant diverses dispositions institutionnelles en Polynésie française
Monsieur le président,
Madame la ministre des outre-mer,
Monsieur le président de la commission,
Monsieur le Rapporteur,
Mes chers collègues,
Je vous fais part, au nom du groupe Les Indépendants, de nos réflexions sur ces deux textes que nous examinons cet après-midi, relatifs au statut d’autonomie la Polynésie française.
Ainsi qu’il a été rappelé, les dispositions que nous étudions sont dans une certaine mesure technique, mais l’une d’entre elles est très symbolique.
Je ne reviendrai pas dans le détail sur les modernisations et adaptations proposées par ces textes. Nous tenons à saluer à cet égard le travail accompli par le rapporteur, notre collègue Mathieu DARNAUD. Son rapport fait ressortir avec justesse la nécessité d’adopter ces deux projets de lois.
Nous souhaitons également remercier notre collègue Lana TETUANUI pour ses apports conséquents aux textes ainsi que pour son éclairage, et remercier aussi la délégation polynésienne qui est venue échanger avec nous il y a peu.
Le statut polynésien a besoin d’être modernisé, et de mieux prendre en compte les particularités de ce territoire.
A ce titre, il nous semble que l’évolution, contenue dans ces projets de loi organique et ordinaire, vers plus de compétences données aux communes, est une bonne chose, et, chers collègues, pourrait - pourquoi pas ? - inspirer une nécessaire relance de la décentralisation en métropole, et je l’espère, l'évolution du statut que j'appelle de mes vœux, à Wallis et Futuna. Plus de compétences données aux communes est d’autant plus judicieux lorsqu’il est question de la Polynésie française, composée d’archipels répartis sur un espace aussi grand que le continent européen.
Il est ainsi indispensable de développer la coopération entre le gouvernement du pays et les communes, mais aussi entre les communes elles-mêmes, en favorisant l’intercommunalité.
Nous pensons également que des adaptations devraient être apportées pour permettre un fonctionnement plus pragmatique des différents outils que sont les Autorités Administratives Indépendantes, les syndicats mixtes ouverts, et les sociétés publiques.
Dans ce même souci de pragmatisme, et afin de répondre au mieux à la situation de ce territoire, les dispositions touchant au fonctionnement de l’Assemblée de Polynésie, renforçant sa stabilité et son efficacité, sont des mesures de bon sens qu’il nous faut adopter.
Le projet de loi organique tel qu’amendé a su prendre en compte les spécificités polynésiennes, et notamment la complexité de la question foncière de ces archipels.
Ces textes contiennent donc des avancées certaines. Pour autant, nous pensons que les mesures ne vont pas assez loin dans la reconnaissance de la dette de la France à l'égard de la Polynésie française.
L’article 1er du projet de loi organique reconnaît en effet la contribution de la Polynésie à la construction de la capacité de dissuasion nucléaire de la Nation. Mais dire cela, c’est bien peu dire. De l’avis même du Conseil d’Etat, les dispositions de l’article 1er sont largement dépourvues de valeur normative. Nous comprenons cependant la nécessité d’une telle inscription.
Plus de 90% des essais nucléaires français ont été réalisés à Mururoa et Fangataufa. Au total, c’est environ 700 fois la puissance de la bombe d’Hiroshima qui a été libérée dans le ciel et dans le sol de Polynésie une trentaine d’années durant.
Malgré cela, nous avons assisté ces dernières années à des mesures de tâtonnement qui ne sont pas à la hauteur des enjeux, ni de l’Histoire. Il ne faut pas minimiser les conséquences de ces essais, à la fois sur la population mais aussi sur l’environnement. Il faut une juste reconnaissance, un juste accompagnement et une juste indemnisation.
Cela dit, il faut regarder ensemble vers l’avenir et mettre notre cœur à l'ouvrage pour développer la Polynésie française et la rendre durablement prospère.
Nous réaffirmons notre conviction : la Polynésie française a toute sa place au sein de la République et doit bénéficier d’une politique différenciée. Ceci vaut pour tous les outre-mer, qui recouvrent une grande diversité de situations. Je suis moi-même sénateur des îles Wallis et Futuna et je serai particulièrement attentif aux mesures foncières qui pourraient nous être proposées par le Gouvernement. Cette question est très délicate et rien ne devra être décidé sans concertation avec les autorités de Wallis et Futuna.
Les Outre-mer ne sont pas une charge comme on l'entend parfois, ils sont au contraire une chance extraordinaire pour la France et pour les français.
La France est présente dans tous les océans du monde grâce à ses outre-mer ; elle bénéficie de la deuxième Zone Economique Exclusive, plus de 10 millions de kilomètres carrés qui pourraient et devraient être mieux mis à profit. Les outre-mer sont une vraie richesse pour la France, ils sont des atouts économiques, naturels, géographiques, culturels, et stratégiques. Quelle autre Nation peut en dire autant ?
La Polynésie française, comme d'ailleurs la Nouvelle-Calédonie et Wallis et Futuna, incarne la République française à plus de 20 000 kilomètres de Paris. Nous considérons que bien plus pourrait être fait pour dynamiser ce pays d’outre-mer et utiliser ses forces.
En effet, le taux de chômage y atteint 24% et le quart de la population au moins vit sous le seuil de pauvreté. Il faut que ça change ! Les sacrifices qu'elle a faits pour la mère patrie, ne justifient-ils pas d’autant plus que l’Etat l'aide à sortir du marasme ?
Madame la Ministre, notre groupe votera ces projets et restera vigilant quant à l’action de l’Etat dans ce territoire.
Merci.