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Colette MELOT : Conclusions CMP - PPL Mesures de sûreté pour les auteurs d'infractions terroristes

23 juillet 2020


Conclusions de la commission mixte paritaire sur la proposition de loi instaurant des mesures de sûreté à l'encontre des auteurs d'infractions terroristes à l'issue de leur peine

Madame la Présidente,

Monsieur le Garde des Sceaux,

Monsieur le Président de la Commission des lois,

Madame la Rapporteure,

Mes chers Collègues,


Permettez-moi, avant tout, de saluer le travail de Madame la Présidente Catherine Troendle. Nous avons partagé beaucoup de moments importants au cours des dernières années et je voudrais en particuliers évoquer le groupe d’amitiés France-Allemagne que Catherine Troendle a animé avec beaucoup de diplomatie et de passion. Ce sont des moments importants que je n’oublierai pas. Merci beaucoup.


Les deux chambres du Parlement se sont accordées sur une version commune du texte. Nous avons déjà eu l’occasion de dire que nous partageons pleinement l’objectif poursuivi par cette proposition de loi, qui vise à instaurer des mesures de sûreté à l'encontre des auteurs d'infractions terroristes à l'issue de leur peine. Le terrorisme est une menace qu’il nous faut combattre.


Nous avons cependant toujours quelques réserves sur les moyens prévus pour ce faire. La plus emblématique des mesures de sûreté dont il est question, est le port du bracelet électronique qui n’est en rien une géolocalisation.


Cette mesure pourra être ordonnée seulement si la personne concernée y consent. Les autres mesures proposées figurent déjà dans d’autres dispositifs et ne nous paraissent pas suffisantes pour garantir une absence de récidive.


Le gain de sécurité pour les Français nous paraît trop mineur pour justifier le coût juridique de ces mesures. Ce texte a en effet soulevé de nombreuses critiques, de la part des avocats et des magistrats notamment.


Ils dénoncent ainsi la contradiction de principes juridiques fondamentaux comme celui de non bis in idem, ou encore celui de non-rétroactivité de la loi pénale.


Dans son avis, le Conseil d’État a qualifié les dispositions envisagées de mesures de sûreté et non de peines, même s’il reconnaît qu’en raison de l’empilement des dispositifs en la matière, la frontière entre peine et mesure de sûreté n’est, je cite, « pas toujours nette ».


Ces mesures n’étant que restrictives et non privatives de liberté, il ne voit pas d’obstacle à leur application rétroactive.


Il est cependant problématique de relever dans le même avis que ces mesures ont vocation à remplir la fonction du suivi socio judiciaire pour les personnes détenues pour terrorisme qui n’y auraient pas été condamnées.


C’est problématique parce que le suivi socio judiciaire est une peine complémentaire, et comme toute peine, son application ne devrait pas être rétroactive.


Enfin, l’arsenal juridique permettant de lutter contre le terrorisme a été rendu trop complexe par un empilement de mesures éparses – vous l’avez mentionné Monsieur le Ministre -. Une complexité qui nuit à l’efficacité de l’action de l’État, comme le rappelle le Conseil d’État.


Nous ne souhaitons pas ajouter aujourd’hui une nouvelle mesure exceptionnelle à un arsenal qui souffre déjà d’une trop grande complexité.


Le sujet de la lutte contre le terrorisme mérite toute notre attention et un travail approfondi. Nous souhaitons que les dispositifs existants fassent l’objet d’une évaluation, et qu’ils soient, le cas échéant, harmonisés pour être rendus plus efficaces.


Nous voulons également davantage de moyens matériels et humains pour la justice et pour les services d’enquête. C’est ainsi que nous pourrons combattre efficacement la menace terroriste.


Plus généralement, il faudra réfléchir, à terme, aux moyens de renforcer l’efficacité de la réinsertion des personnes condamnées. La récidive est l’un des défis les plus importants de notre politique pénale. Nous devons nous assurer que la sanction pénale concoure à la diminution de la criminalité en permettant la réhabilitation du citoyen.


La présente proposition de loi nous semble être en contradiction avec des principes essentiels de notre droit sans pour autant apporter les solutions nécessaires à la sécurité des Français. Le Groupe Les Indépendants s’abstiendra donc majoritairement.


Interventions au Sénat

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