7 Décembre 2023
Projet de loi de Finances pour 2024 : Mission Médias, livre et industries culturelles (Compte spécial : avance à l'audiovisuel public)
Madame la Présidente,
Madame la Ministre,
Mes chers Collègues,
Les industries culturelles représentent un enjeu majeur de souveraineté. Qu’il s’agisse de notre musique, de nos films, de nos livres ou de nos jeux vidéo, toutes ces œuvres sont exportées dans le monde entier et diffusent notre histoire, notre culture, nos modes de vie, nos valeurs et nos paysages. Il importe donc de les conforter.
Le projet de loi de finances pour 2024 traduit parfaitement cette ambition d’universalité, avec un soutien renouvelé à ces différents secteurs et des crédits dédiés en progression de 7,6 % par rapport à 2023.
Concernant le livre, la politique de l’État consiste à favoriser le développement de la création littéraire et la diffusion la plus large possible, des pratiques de lecture.
Il s’agit bien entendu d’un motif de satisfaction mais nous savons combien l’industrie du livre est fragile.
La recomposition en cours des groupes d’édition les plus importants, les coûts actuels du papier, l’émergence de l’intelligence artificielle, les tensions sur le partage de la valeur entre les auteurs et les éditeurs, ou encore les difficultés de trésorerie des libraires, le démontrent tous les jours.
En matière de lecture, l’effort de l’Etat repose sur la dotation générale de décentralisation. Il permet à un certain nombre de collectivités territoriales volontaires d’adapter et d’étendre les horaires d’ouverture de leurs bibliothèques.
Cependant, ce soutien, prévu pour une durée de cinq ans, arrive à son terme. L’échéance prochaine du dispositif fait peser de lourdes incertitudes sur la poursuite de cette ambitieuse politique publique. Il s’agit d’un point de vigilance.
Permettez-moi, par ailleurs, de saluer le soutien constant de l’Etat à la Bibliothèque nationale de France, qui porte un projet essentiel pour l’avenir d’un certain nombre de ses collections, celui du pôle de conservation d’Amiens.
De son côté, le jeu vidéo reste le premier loisir des Français et s’impose en tête de podium des industries culturelles. La France est à l’avant-garde mais fait face à des géants. Nos studios représentent un levier d’influence fort, que nous devons protéger des appétits croissants des grandes puissances étrangères.
C’est pourquoi la prorogation du crédit d’impôt en faveur des créateurs de jeux vidéo jusqu’au 31 décembre 2026 répond à cet objectif.
En matière de musique, la question du financement du Centre National de la Musique est un sujet complexe, évoqué à maintes reprises au sein de la commission de la culture.
Son modèle économique n’est toujours pas stabilisé et il ne dispose pas des fonds nécessaires pour mener à bien ses missions.
Je prends acte de la création, décidée par le Sénat dans le cadre de ce PLF, d'une taxe affectée qui serait acquittée par les plateformes de streaming numérique.
Toutefois, j’avais formulé une proposition médiane, qui n’a malheureusement pas prospéré, consistant à aménager la taxe sur la diffusion en vidéo physique et en ligne de contenus audiovisuel (taxe YouTube), afin de ne prendre en compte que la part des revenus publicitaires monétisant des contenus musicaux.
Faire contribuer indistinctement l’ensemble des acteurs, y compris les plateformes européennes sur abonnement comme Spotify et Deezer, qui reversent 70 % de leurs revenus aux auteurs, artistes, éditeurs et producteurs, ne m’apparaît pas comme la solution la plus pertinente.
Il me semble vraiment préférable d’approfondir la question d’une contribution volontaire des grandes plateformes de musique enregistrée. J’espère que les négociations en cours permettront de parvenir à cette solution équitable pour le financement du CNM, avant le retour du texte à l’Assemblée nationale.
En matière de médias et d’audiovisuel public, notre Groupe souhaite insister sur l’importance de la diversité de la presse, générale et spécialisée, et de l’indépendance des médias.
Il est également essentiel de s’assurer de l’accès de tous à une information de qualité. Les temps instables que nous traversons nous engagent à garantir à nos concitoyens des médias fiables.
Nous devons collectivement nous protéger de la désinformation qui se répand malheureusement de manière fulgurante. Il en va de notre cohésion nationale.
La future réforme des aides directes à la presse devra tenir compte de ces enjeux majeurs.
Je tiens, à cet instant, à saluer tout particulièrement le travail mené par la chaîne Arte à travers sa plateforme numérique, qui donne accès gratuitement à des contenus de grande qualité.
Enfin, je voudrais en quelques mots évoquer la situation du cinéma, qui suscite bien des débats et, j’oserai même affirmer, une certaine forme de « cinéma bashing ».
Je regrette profondément la suppression de l’article 5 duovicies du PLF, qui prorogeait, pour une durée supplémentaire de deux ans, le bénéfice du crédit d’impôt pour les dépenses de production d'œuvres cinématographiques et audiovisuelles.
Ce crédit d’impôt permet d’attirer sur notre territoire de grosses productions cinématographiques, des séries TV et des œuvres d’animation étrangères.
Il s’agit d’un très mauvais signal adressé aux producteurs, qui vont rapidement se tourner vers des pays plus attractifs comme le Royaume-Uni.
C’est également un mauvais signal pour l’industrie du cinéma français, largement mise à contribution par ces productions étrangères.
Par ailleurs, nous avons été nombreux à soutenir le maintien du dispositif fiscal dont bénéficient les contribuables souscrivant au capital des sociétés de financement de l’industrie cinématographique et de l’audiovisuel, les SOFICA. Cet instrument financier est important car il permet d’orienter l’investissement vers la production indépendante.
Je me réjouis donc du retour à meilleure fortune du cinéma français après une période post-Covid extrêmement incertaine et une grève de longue durée des acteurs américains, qui vient de prendre fin et s’est conclue par la ratification d’un accord avec les studios.
La politique poursuivie par l’Etat en faveur des Médias, du Livre et des Industries culturelles est ambitieuse et équilibrée. Nous nous en réjouissons.
C’est pourquoi le Groupe Les Indépendants votera les crédits de la mission.
Je vous remercie.
SEUL LE PRONONCÉ FAIT FOI