22 Novembre 2023
Proposition de loi constitutionnelle visant à faciliter le déclenchement du référendum d'initiative partagée
Monsieur le Président,
Monsieur le Garde des Sceaux,
Monsieur le Rapporteur,
« La démocratie c’est le gouvernement du peuple par le peuple, et la souveraineté nationale, c’est le peuple exerçant sa souveraineté sans entrave » disait le Général de Gaulle en 1942.
L’absence d’entrave ne signifie évidemment pas l’absence de cadres. L’actuel article 11 de la Constitution fixe plusieurs conditions à la mise en œuvre du référendum, notamment à celui d’initiative partagée. L’article définit avec précision le périmètre d’une telle consultation.
Il fixe également des seuils minimaux de parlementaires et de citoyens pour la mise en œuvre de ce dispositif : 10 % du corps électoral et 20 % des parlementaires.
Nos collègues socialistes nous invitent à élargir le périmètre et à abaisser ces seuils. Les justifications avancées sont claires : il s’agit de faciliter la consultation de nos concitoyens sur les grands sujets politiques.
Les auteurs estiment par ailleurs qu’une telle facilitation est à même de remédier, au moins partiellement, au déclin de la participation de nos concitoyens aux élections.
Ces objectifs sont louables. Je crois que nous regrettons tous que le recul de l’engagement démocratique dans notre pays. Néanmoins, la proposition de nos collègues se heurte à plusieurs obstacles.
Le Président du Sénat a relancé le groupe de travail sur les institutions, précisément sur la question des référendums. A n’en pas douter, la proposition de nos collègues socialistes constitue une contribution de poids. Cependant, il peut être prématuré de se prononcer sur l’un de ces sujets, avant que nous soyons allés au bout de ce processus.
Le fait que, jamais en huit ans, un référendum d’initiative partagée ne soit parvenu à être soutenu par 4,87 millions d’électeurs fait dire à nos collègues que ce seuil doit être abaissé. Nous n’en faisons pas la même interprétation.
Au-delà du fait que 8 ans constituent une période relativement courte période de temps pour nos institutions, nous pensons que ces seuils n’ont pas été atteints car la très grande majorité de nos concitoyens ne souhaitait pas être consultés sur les sujets en cause.
1 million d’électeurs représentent 2% du corps électoral de notre pays. Est-il légitime qu’une si faible proportion puisse imposer une consultation aux 98% restants ? Nous ne le pensons pas.
Que des minorités politiques manifestent leur opposition et expriment leurs revendications, rien de plus légitime. En revanche, il nous apparaîtrait injuste qu’elles puissent imposer des consultations intempestives. D’autant plus, lorsqu’aucun contrôle ne serait effectué par le Conseil constitutionnel.
Et a fortiori, lorsque le format binaire du référendum polarise nécessairement en excluant toute nuance. Nous connaissons les dangers du populisme. Les auteurs de la présente proposition appellent de leurs vœux un référendum sur une réforme des retraites adoptée par 49.3 mais le récusent lorsqu’il s’agit d’autres sujets de société.
Les membres de notre groupe sont de fervents partisans de la démocratie représentative. Nous sommes convaincus que la consultation de nos concitoyens sur les politiques de notre pays doit rester exceptionnelle, si nous ne voulons pas fragiliser davantage la légitimité du travail parlementaire.
Au moment où le débat politique se polarise, il nous semble essentiel de renforcer nos institutions et leur stabilité. Nous voterons donc contre l’adoption de cette proposition.
SEUL LE PRONONCÉ FAIT FOI